Ce soir
Je soupire ma ville
La femme colombe du bout du lac
Ma Genève
Elle tremble
La belle
Sous la fine pluie
D’un jour d’hiver
Elle a peur
Ma vieille aux mille fards
Peur
Que la pluie cesse
Peur
Que s’entrouvrent les nuages
Peur
D’un demain
Dont elle croit
Avoir lu la main
Ses lumières
Jadis vives
Comme les rêves
Des chercheurs de paix
Ont pris le teint blafard
Des malades imaginaires
Ses amoureux se cloitrent
Et oublient de faire l’amour
Ses passants marchent sans but
Sous leurs parapluies fermés
Et tous ses autres se figent
Devant les lumières bleutées
De leur hébétude
Elle a si peur
Ma Genève
De l’hiver
Qui senfuit
Ce n’est plus’une question de jours
Maintenant
Une question de temps
Avant que les derniers espoirs
Las
Ne quittent la ville
Ils prendront alors leur envol
Dans le grand ciel bleu
Vers là-bas
Vers le Sud
Et ses infinis
A tire d’aile
Ne laissant que vide
Silence
Et absence
Dans le coeur des hommes
Et quelque part
Au-delà de ma ville
Au dessus des hommes
Entre deux temps
Deux saisons
Ils croiseront
Dans un souffle
Les hérauts
De la saison nouvelle
Les petits êtres
A la plume légère
De retour
Innocents
Vers leur terre d’accueil
Au calme de mon lac
Et ils clameront alors :
Bonjour à toi
Hirondelle
Je salue ton vol
Qui depuis la nuit des temps
Nous apporte printemps neuf
Bonjours à toi
Oiseau du bonheur
Cette année
Suspend ton vol
Prend garde
Car nous
Qui de toute éternité
T’attendions
De sourire ferme
Tapis dans l’enfance
Des hommes
Avons été chassés
Des murs des villes
Par les prédicateurs
Du malheur
Prend garde
Bel oiseau
Car à présent
Genève
A peur de ton chant
Et alors
Peut-être
Nous abandonneront-elles
Les belles hirondelles
Et alors
Je les suivrai
Quittant ma ville
Mon aimée
Sans un regret
Pour rejoindre ces mêmes terres
Ou les hirondelles
Font encore le printemps