cinq

Ce matin, chez Natan, par la lucarne, deux personnes regardent les corbeaux lustrer leur plumage sur le toit de l’Eglise. Ils sont nus. L’Eglise ne leur en veut pas.
Ils viennent de jouer au piano, aux vocales, à l’amour.
Pêle-mêle sur le plancher, plus de partitions que jamais.
Des pages et des pages à quatre mains, deux écritures.
Une histoire d’amour en musique.

 

Leur vie commune.
Jouant à la marelle entre les tas de notes, Eve regarde son nouvel amour. En sautillant.
Un. Deux. Trois. Enfer.
– Ce jour là, tu ne disais pas au revoir à l’hiver, n’est-ce pas ?
– Non.
– Tu regardais les marchands de marrons.
– Oui.
– Tu les connaissais ?
– Du tout.
– Mais alors pourquoi ? Tu avais l’air si mystérieux. Si intrigué.
– C’est très rare, de voir partir ces gens-là.
Un. Deux. Trois. Paradis.
Elle le regarde. Le plus sérieusement du monde. Il tient son regard. Elle se dérobe. Soudain, un tremblement. Une fissure dans le masque serein de son visage. Frisson. Vague. Une mèche de cheveux cache la première secousse.
La seconde est trop forte. Elle éclate de rire.
– Je ne pensais pas que tu te moquerais de moi, réplique Natan, froissé.
Elle reprend son calme. Trop rapide pour le plus perfectionné des sismographes. Elle le toise. S’approche de lui. Lui met les mains sur les épaules. Soupire.
– Tu es très loin du compte mon chou. Je ne me moque pas de toi. C’est de moi dont je ris. C’était la raison de ma présence ce jour là. J’attendais le premier marchand de glaces.
Le visage de Natan revient au calme.
Sa main, tremblante une seconde auparavant, se lève, effleure le visage d’Eve. Le caresse, le souligne. Ses doigts tapent un accord sur sa joue droite. Une volée de note. Elle lui sourit.
Ensemble, ils regardent le lit.
Toute la gamme des charmes.

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